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01/09/2005

Exposition et copyright

Une belle initiative : l'exposition Sergio Leone : Once upon a time in Italy, organisée par le Museum of American West (Autry National Center, Los Angeles). Pour tous ceux qui n'auront pas l'occasion de s'y rendre, elle peut se visiter en ligne. C'est là qu'une nouvelle occasion m'est donnée de râler un peu contre ces histoires de droits qui chatouillent tellement certains. (Comme le dit justement Robert Evans dans le documentaire The Kid Stays In The Picture : détenir les droits, c'est détenir le pouvoir).

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Bref, un grand nombre de documents (photos, affiches) sont inaccessibles pour cause de copyright. C'est très américain, ça, privatiser la culture. Comme si Sergio Léone ne faisait pas désormais partie d'un patrimoine commun. Comme si toutes ces affiches, toutes ces photographies d'exploitation n'étaient pas avant tout de la promotion, donc destinées à circuler et à être vues par le plus grand nombre. Comme si de nombreux collectionneurs et amateurs ne les avaient pas de part le monde. C'est le genre de truc qui m'énerve et qu'il ne faut pas laiser passer, sinon, il y aura bien un imbécile pour privatiser la Joconde un de ces jours !

Dans le même état d'esprit, cette exposition est abondamment annoncée dans le DVD de Il Etait Une Fois La Révolution. Le DVD est diffusé par MGM. Et ce que je trouve à la fois amusant et pénible, c'est que, dans les documentaires, ils se débrouillent pour parler de la carrière de Léone sans quasiment mentionner Il Etait Une Fois Dans L'Ouest, dont le DVD est distribué par Paramount (ou ce qui en tient lieu aujourd'hui). Pareil pour Il Etait Une Fois en Amérique, distribué par Warner. Et blackout total sur Le Colosse de Rhodes (diffusé en France par Canal+), sur Mon Nom est Personne et Un Génie, Deux Associés Et Une Cloche (pas encore sortis) qui ont, quand même, leur importance dans l'oeuvre léonienne. Allez faire un travail de fond avec ça.

02/08/2005

Week end chargé

Ce week-end, sous la chaleur torride, j'ai revu, l'un derrière l'autre Il était une Fois en Amérique de Sergio Léone et Voyage au Bout de l'Enfer de Michael Cimino. C'est quelque chose. Quelle ampleur ! Quels films ! Quels points d'exclamation ! Outre le fait que le second commence là où se termine le premier, les deux films ont plusieurs points communs, que ce soit dans par leur conception du cinéma, l'ambition de leurs auteurs, leur approche des mythes américains et la présence de Robert De Niro.

C'est sans doute lui qui m'a le plus frappé. Parce que je n'ai jamais bien compris l'engouement dont il a été (et reste) l'objet. Ce n'est pas que je ne l'apprécie pas, mais j'ai toujours préféré James Stewart à Marlon Brando, et donc, plutôt que De Niro, Nick Nolte, Harrison Ford ou Bill Murray. Plutôt classique que Méthode. Et puis, bien qu'appréciant les thèses de Luc Moullet sur la théorie des acteurs, je reste persuadé qu'un comédien, même excellent, n'est rien sans un metteur en scène digne de ce nom. Ce qui me semble particulièrement vérifié dans les deux films précités.

De Niro est plus qu'excellent ici, il incarne littéralement Noodles, le petit truand juif de Léone comme le solide Mike de Cimino. Quel plaisir aussi de le voir intégré à deux équipes de comédiens au-delà de tout éloge convenu. James Wood, Treat Williams, Joe Pesci, William Forsythe, Elisabeth Mc Govern et John Savage, Christopher Walken, John Cazale, Meryl Streep (elle aussi miraculeuse dans ce film), Georges Dzundza... J'adore ces films matrices qui donnent ainsi le départ à une génération de comédiens.

Alors, De Niro, oui, son sourire final chez Léone, derrière la gaze et les vapeurs d'opium. Son regard et sa démarche, voûtée mais déterminée, à la recherche du temps perdu, à la recherche des traces de la promesse du rêve américain, en exploration des territoires du film de gangster. Si vrai, si sincère, si précis que l'on croirait que Léone a bien eu l'enfance d'un gamin dans un quartier juif new-yorkais. Léone en Proust. Je l'avais entendu à l'époque mais je n'avais pas encore lu La Recherche. Aujourd'hui, je comprends mieux. Et je n'apprécie que mieux.

De Niro, sa casquette et son gilet, sa façon de se glisser sur les pentes de la montagne comme un personnage d'Anthony Mann, sa façon d'envoyer chier John Cazale qui a oublié ses bottes, son aisance dans les magnifiques scènes de groupe. Il y a dans ce film quelque chose de remarquable, c'est que la première heure est quasiment muette. Non que les personnages ne parlent pas mais il n'y a presque aucune réplique « utile ». Rien que des gens vivants à l'usine, au bar, en virée, au mariage, avec des mots insignifiants de tous les jours. Et on comprend tout. Les rapports, les sentiments, les liaisons intimes, l'amour, l'amitié, l'urgence. La vie.

Très fort.

Et quel gâchis quand on pense à ces âneries enfilées comme des perles de plastique où tant de talent s'enlise et s'use. Promis, je n'attaque pas l'air du « c'était mieux avant ». Mais c'est difficile de se retenir quand on pense à Ronin ou Mon Beau Père et Moi.

17/07/2005

John, Sean et Juan

Il est toujours excitant de donner une nouvelle perspective à un film que l'on aime et que l'on croit bien connaître. Une autre façon de le voir, une façon de le redécouvrir. C'est ce qui vient de m'arriver avec Il Était une Fois, la Révolution de Sergio Léone. C'est un film que j'ai vu pour la première fois vers dix ans et ça marque.

A l'occasion de la sortie en DVD de la version intégrale (par MGM, je reviendrais dessus pour gueuler un coup), un petit documentaire explore les différentes version et donne une vision originale du personnage de Sean-John joué par James Coburn, qui approfondit aussi sa relation avec le bandit mexicain Juan joué par Rod Steiger. Tout est basé sur les prénoms.

Il y a un jeu là dessus dans le film entre les deux hommes. Quand Juan demande à l'irlandais comment il se nomme, celui ci répond doucement « Sean ». Juan ne saisit pas et l'autre reprend « John ». Dans ce prénom, Juan voit un signe du destin qui lie les deux hommes. C'est à partir de là qu'il refuse de le quitter et veut à toute force travailler avec lui. C'est le déclencheur de toute leur histoire.

Jusqu'ici, je pensais que « Sean » était bien le prénom du personnage de Coburn, et que, quand il dit « John », c'est pour donner une traduction anglaise à Juan, d'autant qu'il n'a pas trop envie de discuter avec lui. Mais ce que que fait remarquer Glenn Erickson dans le documentaire, c'est que tout le monde appelle l'irlandais « John » dans le film, y compris le journal anglais qui le présente comme un terroriste. De fait, mis à part la réplique de Coburn, « Sean » n'est jamais entendu dans le film, à l'exception notable de la chanson de Morricone, cette incantation obsédante « Sean, Sean, Sean... ». Alors, si John est bien John, qui est Sean ? Réponse : l'ami irlandais (joué par David Warbeck). Celui qui a trahi et que John finit par tuer dans le pub. Et là, ça change pas mal de choses. Cet air entêtant n'est pas seulement le signe de la nostalgie de l'Irlande et de la Révolution, c'est le fantôme de l'ami, le fantôme de la culpabilité que John s'est trimballé au Mexique. Quand John dit « Sean » à Juan, c'est qu'il l'assimile déjà, inconsciemment à un ami. C'est aussi une façon d'incarner son ami pour racheter sa perte.
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Là, Erickson va encore plus loin. En analysant le fameux flash-back final, où l'on découvre que les deux hommes étaient non seulement liés d'amitié mais aussi partageaient la même femme (elle même symbole de la Révolution qu'ils ont tout les deux embrassée), on remarque que la musique de Morricone sépare la séquence en deux parties. La première avec le thème « Sean, Sean... » qui montre John avec la Femme, puis, rupture et émergence d'un thème plus sombre entendu lors des scènes dans le pub, lorsque celle-ci se jette dans les bras de Sean et l'embrasse. A ce moment, John est « sortit » du cadre et on termine sur son visage qui devient flou, souriant. D'où l'idée que, dans ce sourire, dans cette « exclusion » du plan, il pourrait y avoir de la jalousie et que, c'est peut être John qui a donné Sean aux anglais pour éliminer un rival en amour, avant que celui-ci, torturé, ne donne John à son tour dans le pub.

Voilà qui redonne de la perspective, non seulement au personnage de John, à sa culpabilité, qui va au-delà de la nostalgie ou du discours politique sur le Révolution, mais aussi à sa relation avec Juan, plus profonde que ce que l'on en voit, marquée pour John par le désir de se racheter. Il voit dans sa relation avec Juan une sorte de seconde chance en amitié. Cette interprétation donne aussi plus de poids aux rapports entre John et Villega (Romolo Valli), le bourgeois révolutionnaire qui a lui aussi été torturé pour livrer ses camarades de combat.

Cela peut sembler un peu tiré par les cheveux, mais il n'y a rien, chez un cinéaste comme Léone, qui est laissé au hasard. Si l'on repense à Il Était Une Fois en Amérique et à son thème central, la trahison, il y a des chances que cette vision touche juste.

Une étude en italien qui développe la même théorie.
 
Le DVD 

15/07/2005

Flashback

Le plus beau et le plus douloureux des souvenirs.
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Photographies : capture DVD MGM